Promesse de campagne d’Emmanuel Macron, le service militaire obligatoire et universel d’un mois pourrait se transformer en "parcours citoyen". franceinfo vous dévoile les premières pistes de réflexion suivies par les députés.
ICILe souvenir du service militaire, rebaptisé service national en 1971 avant d’être suspendu par Jacques Chirac en 1996, est encore fortement ancré dans l’imaginaire collectif des Français. Cependant, selon l’historienne Bénédicte Chéron spécialiste des relations armées-société, on se méprend sur le sens original qu’il avait. « Sa première vocation c’était de fournir à la Nation des militaires, des hommes en arme capables de défendre la frontière puisqu’on avait un ennemi aux frontières à l’époque, qui s’appelait l’Allemagne ».
En décidant non pas de rétablir le service militaire mais de créer un service national universel (SNU), incluant aussi les femmes pendant trois à six mois, Emmanuel Macron vient de poser un acte politique majeur.
Si on ne sait pas encore à quoi ressemblera ce service national, le président devra répondre à trois questions :
- que faire faire aux 800 000 jeunes à accueillir chaque année ?
- Pourquoi ?
- Comment ?
Emmanuel Macron l’avait promis durant sa campagne : un service militaire obligatoire et universel d’un mois serait instauré lors de son quinquennat. Finalement, ce nouveau service national pourrait plutôt prendre la forme d’un "parcours citoyen" obligatoire d’une semaine par an. Il s’agit d’une des pistes étudiées par les députés en charge d’établir un rapport qui sera rendu public à la fin du mois.
Trois étapes du collège à la seconde
Contrairement au service militaire, ce parcours ne s’adresserait pas aux jeunes de 18 ans, mais à tous les élèves âgés de 10 à 16 ans.
Il se déroulerait en trois étapes, dans les établissements scolaires, et serait encadré par des enseignants et des volontaires du service civique. Ce système aurait l’avantage d’être beaucoup moins coûteux pour l’État.
Première étape : chaque année au collège, une semaine serait consacrée à la défense et à la sécurité, mais aussi aux gestes qui sauvent, aux droits et devoirs, ou à la mémoire. Les élèves pourraient également profiter de ces semaines pour faire des bilans de santé, ou des bilans sur l'illettrisme.
La deuxième étape de ce parcours arriverait en classe de seconde avec une semaine d’immersion pour favoriser la mixité sociale et les valeurs fraternelles. Un dispositif semblable aux stages de troisième, mais dans des associations qui viennent en aide aux personnes âgées ou aux en sans-abris, par exemple.
Enfin, troisième étape : la délivrance d’un passeport citoyen en fin de seconde. Ce papier pourrait permettre à chaque jeune de prolonger son engagement après ses 16 ans s’il le souhaite. Il lui offrirait également certaines facilités, comme entre autres, un accès simplifié et moins cher au permis de conduire.
L'enclume des voeux, le marteau des Armées
Ce service national serait donc porté essentiellement par l’Education nationale et non plus par le ministère des Armées. Et pour cause, contrairement au président de la République, il s’en trouvera peu, dans ce dernier ministère, pour défendre l’idée d’un nouveau service militaire. Au mieux certains défendront une coopération interministérielle.
Mais, faute de moyens et d’infrastructures pour accueillir les 600 000 jeunes potentiellement concernés chaque année, pas question de supporter seul un nouveau service national. D’autant qu’actuellement, les missions de sécurité et de défense davantage prioritaires dans un contexte de menaces terroristes ne manquent pas.
Aussi, les députés devront trancher : l’un d’eux confiait ainsi à franceinfo que la Commission était prise “entre l’enclume des vœux jupitériens et le marteau des Armées” : l’image en dit long.
Finalement, le projet parlementaire semble plutôt donner raison aux militaire, d’autant qu’il coûterait, selon les députés, beaucoup moins cher que le souhait du président de la République. Pour mémoire, selon les estimations, le retour d’un service militaire obligatoire d’un mois pourrait coûter une trentaine de milliards d’euros sur la durée du quinquennat.
Les volontaires du service civique en renfort
Les dents grincent déjà du côté de l’Éducation nationale : les enseignants se plaignent déjà du manque de moyens et de difficultés dans les établissements scolaires. Pour les ménager, dans leur projet, les députés expliquent ne pas vouloir surcharger encore les professeurs, notamment ceux d’histoire-géographie et d’éducation civique : il s’agirait de confier ces semaines de “parcours citoyens” à des volontaires, par exemple ceux du service civique.
Pour autant, l’Éducation nationale serait beaucoup plus sollicitée qu’avec un service militaire d’un mois, ne serait-ce qu’en termes d’accueil et d’utilisation de ses infrastructures…
Ceci n’est d’ailleurs qu’un projet, qui pourra évoluer. Les parlementaires remettront ce rapport à la fin du mois à une “Commission indépendante de haut niveau”, nommée par le ministère des Armées. Il faudra pourtant hâter la marche : selon le calendrier que s’est fixé le gouvernement, la décision finale devrait être prise d’ici juin pour une première mise en place de ce nouveau service national en 2019, sans doute à titre expérimental pour commencer.
D’autres pistes à l’étude
Il se déroulerait au collège.
Chaque année, une semaine serait consacrée à la défense et à la sécurité, mais aussi aux gestes qui sauvent.
Deuxième étape en seconde, avec une semaine d'immersion dans une association.
Troisième étape à la fin de la seconde, avec la délivrance d'un passeport citoyen. Une proposition très différente de la promesse initiale.
Si cette hypothèse était retenue, ce serait donc aux collèges et aux lycées d'organiser ce service civique d'un nouveau genre.
Pour l'opposition, c'est la promesse initiale qui était tout simplement intenable.
Ce rapport parlementaire sera remis fin janvier au gouvernement, mais plusieurs élus de la majorité soulignent, ce jeudi 4 janvier 2018 au soir, qu'il existe d'autres pistes de réflexion, tout en respectant la promesse d'Emmanuel Macron.