Pompiers, gendarmes, CRS… La concurrence est pointée du doigt par la Cour des comptes qui dénonce des rivalités qui coûtent cher au Secours en montagne
Un rapport sur l'organisation des secours publié par la Cour des Comptes relève de « nombreux dysfonctionnements ». Le problème de la concurrence entre gendarmes, CRS et pompiers revient en boucle
C'est à la demande de la commission des finances de l'Assemblée nationale que la Cour des comptes s'est penchée sur le secours en montagne, qui représente entre 5000 et 8000 interventions par an en France, réalisées par trois services publics différents : la gendarmerie et ses PGHM (peloton de gendarmerie de haute montagne) et PGM (peloton de gendarmerie de montagne), la police et ses détachements de CRS, enfin, les pompiers et leurs GSMSP (groupe secours en montagne des sapeurs- pompiers).
Les conseillers, qui viennent de publier leur rapport, n'ont pu établir son coût global, faute de « données fiables et exhaustives » des services départementaux d'incendie et de secours (Sdis), mais estiment à 61 millions d'euros celui du dispositif d'État (policiers et gendarmes), dont 31 % sont imputables à l'emploi d'hélicoptères pour embarquer les équipes. Ils chiffrent à 8 600 euros le coût moyen d'une intervention. Et surtout, pointent de nombreuses difficultés.
1. Des rivalités entre secouristes
Le problème de la concurrence entre gendarmes, CRS et pompiers revient en boucle dans la prose de la Cour des comptes. Car dans la plupart des départements de montagne, il n'y a pas un, mais plusieurs services appelés à intervenir.
Pour les Pyrénées-Atlantiques - l'un des six départements visités par les enquêteurs - les gendarmes du PGHM d'Oloron-Sainte-Marie et les pompiers du GSMSP64 se partagent la mission. Ailleurs, comme dans les Hautes-Pyrénées, ce sont les CRS et les gendarmes. Il arrive aussi que les trois services cohabitent, dans les Alpes par exemple.
Mais voilà, le grand amour est rarement au rendez-vous. « De réels conflits existent entre les acteurs, fondés sur des querelles de légitimité historique, technique et juridique », souligne le rapport, qui rappelle que l'entrée dans la danse des pompiers, à partir de la loi de modernisation de la Sécurité civile d'août 2004, a fait et continue de faire grincer des dents chez les gendarmes et CRS, dont les premières unités spécialisées ont vu le jour dans les années 1950.
Ces rivalités, alimentées par le prestige de ce type de secours exigeants et périlleux, ont pris « ces dernières années une ampleur particulière, notamment par le biais des médias ».
Un épisode cocasse remontant à 2009 l'illustre : après un reportage de TF1 sur un entraînement des pompiers en Vallée blanche, près de Chamonix (lieu d'implantation historique du PGHM), la gendarmerie avait répliqué en organisant, quelques mois plus tard, un entraînement médiatisé par la même chaîne dans les gorges du Verdon, zone d'intervention des pompiers… Pas terrible pour réchauffer l'ambiance !
Ces guéguerres ne datent pas d'hier et ont du mal à s'estomper, malgré l'entrée en vigueur d'une nouvelle circulaire ministérielle, en juin 2011, dont le but était pourtant de « rationaliser le dispositif existant et d'apaiser les conflits ».
Problème : son application « souffre de retards ». D'où la persistance de « dysfonctionnements qui, sans être généralement préjudiciables aux victimes, nuisent à l'efficacité des interventions ».
2. Des doublons inutiles et coûteux
Dans certains cas, cette compétition peut conduire à des doublons, les « services se disputant les interventions ». Comme dans les Alpes-Maritimes, où les pompiers ont la fâcheuse tendance à s'engager alors qu'ils ne sont pas intégrés dans le Plan départemental de secours en montagne.
Cette débauche de moyens a parfois pour cause une mauvaise organisation du traitement des alertes. Des couacs que le texte de 2011 espérait pourtant éradiquer en créant un numéro unique d'urgence, le 112.
L'appel de la victime atterrit chez les pompiers, au Codis, chargés de prévenir tous les services spécialisés (équipe de secours en montagne, Samu, base hélico). Mais la transmission n'est pas le fort de tout le monde…
Des pelotons de gendarmes continuent à promouvoir leur numéro de téléphone pour contourner les pompiers. Du coup, certains Codis refusent de transmettre directement les alertes aux PGHM. Etc, etc.
3. L'absence de logique de massif
Autre écueil soulevé par le rapport : la départementalisation du secours en montagne, dont l'organisation dépend des préfets. « Dans certains cas, cette logique ne paraît pas adaptée et ne permet pas toujours un emploi optimum des moyens aériens », soulève la Cour.
Elle étaye sa critique par l'étonnant dispositif à l'œuvre dans les Pyrénées-Atlantiques et les Hautes-Pyrénées, en période estivale. Normalement basé à Pau, l'hélicoptère de la Sécurité civile Dragon 64 est détaché à Gavarnie, dans les Hautes-Pyrénées, pour les semaines de permanence des CRS de Lannemezan, tandis qu'un appareil de la gendarmerie assure depuis Tarbes les besoins du Béarn, le PGHM d'Oloron étant alors d'astreinte.
Conséquence des incohérences du primat de la logique départementale : « lorsqu'une intervention est déclenchée dans l'est béarnais [là où l'activité des secours est la plus importante en été, précise le rapport], l'hélico de Tarbes intervient avec une rotation par Oloron qui entraîne un délai incompressible de 40 minutes », alors que six minutes suffiraient depuis Gavarnie !
Des détours qui ne sont fantastiques ni pour les victimes, ni pour les deniers publics, le coût moyen d'une heure d'hélicoptère étant évalué à un peu plus de 3 600 euros. Et quand on sait qu'ils sont utilisés dans deux tiers des secours en montagne, on ne peut que « s'interroger sur ce chassé-croisé », comme le fait la cour.
Pour y remédier, elle préconise « une approche interdépartementale », qui s'inscrive dans « une logique de massif », et appelle les préfets à « veiller à la plus grande cohérence de l'emploi des moyens humains et matériels ».
Un point qui figure parmi les conclusions générales du rapport, comme la nécessité de rapprocher les formations des différents acteurs. « Un préalable important à une meilleure coordination entre services », sur lequel planche un groupe de travail depuis plusieurs mois.
Sa mission : en finir avec les guerres de clocher ! :pascontent:
Dans les Pyrénées-Atlantiques, les gendarmes et pompiers se partagent et assurent en alternance le secours en montagne avec des hauts et des bas dans leurs relations.
Le secours en montagne est il le théâtre des rivalités dénoncées par la Cour des comptes dans le rapport qu'elle vient de publier sur l'organisation des secours et dans lequel elle pointe de "nombreux dysfonctionnements" ?
« Non », assurent le colonel Thierry Rousseau, commandant du groupement de gendarmerie départementale (GGD.64) et le lieutenant Didier Hisson, responsable du groupe secours en montagne des sapeurs-pompiers (GSMSP.64).
« Ce n'est pas une question d'institutions, mais d'hommes : si les gens ont envie de s'entendre, ça fonctionne. Et chez nous, c'est le cas depuis des années », affirme le second.
Il faut dire que les Pyrénées-Atlantiques ont pris de l'avance sur la circulaire de juin 2011, qui préconise l'alternance des services, de garde une semaine sur deux, pour éviter de se "marcher sur les pieds" et donc se prémunir des conflits stériles.
Dès l'officialisation de l'intégration des pompiers dans le Plan départemental du secours en montagne, en 2002, ce système a été choisi. Mais la bonne entente n'est pas si ancienne et date de 2009, selon Didier Hisson. Comme dans toutes les relations humaines, elle connaît des hauts et des bas.
Un secours controversé
La dernière crise, qu'aborde le rapport de la Cour des comptes, remonte à une intervention des pompiers, le 24 avril 2010, pour retrouver un randonneur victime d'une chute dans un ravin, dans le secteur de la montagne du Rey (vallée d'Ossau).
Pendant plusieurs heures, les pompiers aidés de l'hélicoptère Dragon 64 fouillent la zone, sans succès. Les gendarmes sont appelés en renfort. Le corps sans vie du randonneur est finalement découvert dans des branchages, plus de quatre heures après l'alerte.
Ce drame donnera lieu à l'ouverture d'une information judiciaire, la qualité de l'intervention des pompiers étant mise en cause par certains. Aucun défaut ne sera pourtant révélé et un non-lieu sera rendu.
Mais cette affaire a laissé des traces. « Ce jour-là, des bleus ont voulu se faire des rouges », commente un secouriste qui a participé à l'opération.
« Même si le climat s'est réchauffé avec les gendarmes, on reste méfiant et sur nos gardes », précise un pompier.
De son côté, le colonel Rousseau déplore que la Cour des comptes ravive ce souvenir. « On peut tous foirer un secours et c'est facile de critiquer a posteriori. Il faut rester humble face à ce genre d'affaire. Aujourd'hui, les relations sont excellentes avec les pompiers », insiste-t-il.
Pour autant, ce n'est pas demain que des équipes mixtes, mêlant des gendarmes étant qualifiés « officier de police judiciaire » et des pompiers, verront le jour. L'idée a déjà été soumise, mais n'a pas encore fait recette.
Mais la mission parlementaire estime que cette dualité ne repose pas sur des nécessités fonctionnelles et génère des gaspillages, d’autant plus que les CRS et les S-P, n’ayant pas la qualité OPJ, doivent faire appel aux gendarmes dès lors qu’une affaire est appelée à avoir une suite judiciaire...
..proposition n° 43 : en zone de haute montagne, revenir aux textes, c’est-à-dire à la compétence de la gendarmerie ; veiller également à ce que les pompiers ne se transforment pas en gendarmerie bis." Quant à celle conseillée par la Cour d'imposer une logique de massif, elle a encore du chemin à parcourir. « Cela signifie de revoir totalement l'organisation du secours en montagne dans les Pyrénées-Atlantiques et les Hautes-Pyrénées », rappelle Didier Hisson. Lui est « persuadé, qu'un jour, tous les acteurs seront regroupés. » ils font parti du même Ministère :ange:
En attendant, les 14 gendarmes du PGHM d'Oloron et les 17 sapeurs-pompiers du GSMSP 64 restent des bleu et rouge qui réalisent, respectivement, un peu moins d'une centaine de secours en montagne par an. Et, surtout, ils se parlent. :bisous23:
Des hommes qu'il faut citer en exemple car ils œuvrent pour la victime et non pour leurs égaux personnel....
Je ne leurs dirai que deux choses :
- 1/ allez plus loin ensemble, devenez des pionniers du secours en équipage mixte !
- 2/ Merci pour votre engagement à notre service .