Auteur Sujet: Avis d'Ambulanciers de France (ADF) sur la présence infirmière en ambulance  (Lu 4987 fois)

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Interview ADF de novembre 2012 à la demande du magazine infirmier Actusoins et finalement jamais publiée !!! (vous comprendrez pourquoi à la lecture des questions qui vont suivre…)

1 / De plus en plus de sociétés d’ambulances privées en France semblent faire appel à des infirmiers pour assurer des transports paramédicalisés. Quelle est la raison de ces recrutements massifs? Pourriez-vous me donner un rapide historique du recrutement infirmier dans les ambulances? Pourquoi ce choix? Comment cela se développe-t-il et à qui cela profite-t-il?
 
Nous n’avons pas de statistiques internes pouvant corroborer la réalité de recrutements « massifs » en le domaine d’activité des transports sanitaires (majoritairement exercés dans le secteur privé). Une simple recherche sur internet aurait tendance à montrer que les sociétés de transport sanitaire ayant développé cette particularité sont plutôt rares (une dizaine en France sur 5000 sociétés) . En outre, rien ne nous permet de conclure (d’après les résultats des recherches constatés) que cette particularité est sur une courbe ascendante.
 
En ce qui nous concerne, il nous est difficile de donner un historique de la présence infirmière, en France, à bord d’une ambulance privée, en dehors des contextes particuliers de l’Aide Médicale Urgente (AMU), des Transferts Inter Hospitaliers (TIH) ou des rapatriements sanitaires (RS). Globalement, il est d’usage depuis des années de voir les infirmiers(ères) de divers services hospitaliers (fonction publique) monter à bord d’une ambulance privée en vue :
 
de médicaliser un transport (SMUR, médecin présent) lorsque le champs de compétence ambulancier est insuffisant pour répondre aux besoins d’un(e) patient(e) supposé ou jugé instable.
d’administrer (au sein d’un SMUR) des traitements continus à un(e) patient(e) stable lors d’un transfert inter hospitaliers pour lequel la présence d’un médecin n’est pas nécessairement indispensable. L’administration, en de rares endroits, permet à des sociétés de transport sanitaire de réaliser des Transferts Inter Hospitaliers avec un(e) infirmier(ère) issu(e) des effectifs de la société. Comme nous vous le disions un peu en amont, ce type d’activité est plutôt « marginal » mais peut-être est-il amené à se développer.
d’administrer des traitements continus à un(e) patient(e) stable lors d’un transport longue distance ou rapatriement sanitaire. Observation identique au point précédent. Il s’agit donc généralement d’infirmiers(ères) issus(es) des effectifs d’une société de transport sanitaire collaborant avec des sociétés d’assurances.
 
2 / Dans quels cas doit-il y avoir un infirmier à bord d’une ambulance? Qui décide de la (para)médicalisation d’une ambulance?
 
En réponse aux deux questions, dans l’état actuel de fonctionnement du « système » médical français, seuls les médecins décident.
 
3 / Quel est le rôle d’un infirmier dans une ambulance? De qui dépendent les prescriptions et les protocoles qu’il exécute? (médecin traitant, hôpital, SAMU? )
 
Les ambulanciers(ères) étant formés(es) aux secours à personnes et à la surveillance des patients, leurs appareillages et autres dispositifs, la différence se joue donc de l’administration de traitements (les ambulanciers étant limités à l’oxygène médical) et la réalisation de gestes invasifs dans le cadre de la prise en charge pré-hospitalière urgente, inter-hospitalière et post-hospitalière. En fonction des pays, le rôle et champs de compétence des ambulanciers et des infirmiers est plus ou moins étendu. Il apparaît en France que les deux corporations précitées oeuvrent pour une autre redistribution des cartes. Cela a pour conséquence de remettre en question la définition des rôles de chacun, cette interview en témoigne.
 
Comme pour toute prescription médicale et/ou l’élaboration d’un protocole, un médecin en est à l’origine et quelque soit le secteur d’activité dans lequel il exerce (hospitalier, libéral, sapeur-pompier, SAMU, sociétés d’assurances etc..), les infirmiers(ères) appliquant leurs décisions. Quant à mettre tous les médecins d’accord sur l’utilité de telle ou telle prescription médicamenteuse et/ou la réalisation de tel ou tel protocole visant les infirmiers(ères) exerçant dans le cadre des dits « protocoles » il peut y avoir des points de convergence et de divergence. De là dire aujourd’hui que les médecins du SAMU sont unanimes à l’idée d’une « paramédicalisation » des Services d’Incendie et de Secours (SDIS) via les recrutements (pour le coup massifs)  d’infirmiers(ères) dans le domaine de l’urgence pré-hospitalière, paraît improbable.

4/ Comment l’infirmier trouve-t-il sa place au sein d’un groupe d’ambulanciers? Est-il facilement accepté dans ce milieu?
 
En règle générale un(e) infirmier(ère) n’éprouve pas de difficultés à s’insérer au sein d’un équipage ambulancier. Tout le monde a parfaitement conscience que seul(e) le (la) patient(e) rentre en ligne de compte. A notre sens, la présence infirmière dans le domaine d’activité des transports sanitaires relevant plus de l’épiphénomène il serait probablement plus intéressant de poser la question aux Sapeurs-Pompiers dont la corporation compte 5821 infirmiers(ères).
 

5 / Pour exercer au sein d’une société d’ambulances, l’infirmier doit-il avoir d’autres pré-requis que son Diplôme d’Etat d‘Infirmier?
 
Les infirmiers(ères) intéressés(es) par ce type d’activité peuvent entrer en contact avec des sociétés de transport sanitaire afin d’obtenir plus d’informations. Au regard de la législation nous n’avons pas trouvé d’indications particulières. L’infirmier(ère) ne se substituant pas à l’ambulancier(ère) mais venant complémenter l’équipage…. à priori aucun pré-requis. Les entreprises peuvent probablement demander le permis de conduire daté de plus de deux ans mais dans les faits, l’infirmier(ère) ne devrait que très rarement voire jamais, avoir à conduire l’ambulance.
 
6/ Quel est le positionnement de votre association concernant ces infirmiers parmi les ambulanciers? La collaboration vous semble-t-elle acceptée? Quels seraient les points à améliorer selon vous?
 
ADF (Ambulanciers De France) est un syndicat professionnel de salarié(es) ambulancier(ères) du secteur privé et de la fonction publique hospitalière. Nous oeuvrons dans le sens d’une évolution sociale favorable aux salariés ambulanciers ainsi qu’à l’ensemble de notre profession. Il y a donc deux aspects. Estimant que les salariés (surtout dans le secteur privé) paient le prix fort (et depuis des décennies…) de bons nombres de choix « politiques » incompréhensibles en matière de gestion des fonds publics, il apparut nécessaire pour la première fois de l’histoire de notre profession qu’une organisation se créer autour d’objectifs dépassant le « syndicalisme » traditionnel. En réalité ADF n’a de syndicale que sa forme juridique et sa fonction de défense des salariés ambulanciers. Au delà de ce principe , les ambulanciers peuvent désormais « penser » leur avenir, et notamment, professionnel. Et tout cela au sein d’une structure fonctionnant depuis peu sous le modèle de la démocratie directe et donc, participative. En conséquences, les revendications d’ADF s’inscrivent aussi au delà de la simple revendication salariale car nous, ambulanciers(ères) désirons tout autre chose.
 
A notre sens, rien ne justifie la présence d’un(e) infirmier(e) à bord d’une ambulance sauf à interdire l’accès aux ambulanciers(ères) à l’ascenseur social. Au « système » français privilégiant les années d’études nous préférons le pragmatisme anglo-saxon en le domaine des transports sanitaires. Ce dernier présente de nets avantages et tout particulièrement sur le plan économique sans toutefois porter préjudice au patient. A l’instar des collègues infirmiers(ères) nous ne comprenons pas certaines réticences en matière de transfert de compétences. Il manque aujourd’hui un acteur de type « technicien » dans les ambulances sans que celui-ci soit nécessairement infirmier. Nous croyons en une division du travail et des tâches harmonieuses, chacun à sa place car chacun a, sa place. Certains « mélanges des genres » peuvent être nuisible à l’équilibre d’une collectivité. Parfois le progrès c’est d’aller de l’avant, parfois ne rien toucher, et quelques fois même, regarder en arrière. Le poissonnier se mettant à vendre de la viande au nez et à la barbe du boucher d’en face ne fait l’affaire de personne au bout du compte, si ce n’est éventuellement des personnes qui s’amusent des tensions qui en découlent.
 
Dans l’absolu tout le monde peut collaborer mais une véritable collaboration n’est-elle pas l’affaire de personnes ou de groupes de personnes qui s’engagent au profit d’une recherche constante d’équilibre ? sur le plan économique, avec une dette de 1800 milliards d’euros notre pays montre qu’il est déséquilibré sur ses fondements et l’occasion ne s’est jamais faite sentir aussi pressante de remettre les « choses » à plat. La présence d’infirmier(ère) chez les transporteurs sanitaires ne résoudra pas le problème des dépenses de santé liés à une population vieillissante et résoudra encore moins la question de la désertification médicale, du manque de médecins mais aussi d’infirmiers(ères). Or, on ne manque pas d’ambulanciers(ères) en France. En réponse à ces réalités du présent et probablement du futur une politique se voulant logique irait dans le sens d’un transfert de compétences en direction des infirmiers(ères) à l’image des « nurse practionners » et, la création en parallèle pour les ambulanciers(ères), d’une extension à l’actuelDiplôme D’Etat s’adressant aux bacheliers ou tout le moins, par voie de professionnalisation, aux effectifs existants et en présentant les capacités.

Pour conclure, nous nous posons à notre niveau la question du bien-être ambulancier à travers le bien être-commun. Il nous semble bien que notre corporation est mise à mal depuis toujours et va de mal en pis. Les finances de notre pays ne vont pas vers le mieux non plus. La présence d’IDE à bord d’une ambulance n’est pas une solution salvatrice à quelque niveau que ce soit. A défaut d’être dans un contexte économique globalement favorable à l’embauche, seule la prise de conscience urgente par le milieu médical français de la nécessité de la « déconcentration » des compétences pourra freiner cette fuite en avant à laquelle nous assistons tous et toutes vers le toujours plus de problèmes.


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Aie !

Je n'ose imaginer l'embarras du journaliste lorsqu'il a recueilli ces propos. Ce qui m'interroge c'est pourquoi actusoins, qui est media généralement de qualité, soit allé chercher une interview chez ces farfelus à réaction.