Les pompiers, réunis en congrès à Agen jusqu'à samedi, proposent d'abandonner les appels d'urgence nationaux (le 15 pour le Samu, le 17 pour la police et le 18 pour les pompiers) et d'utiliser un numéro unique pour tous les secours, le 112.
Et si le numéro d'urgence 18 disparaissait ?
C'est la proposition que viennent de formuler les pompiers, réunis en congrès à Agen jusqu'à samedi. A la place, les soldats du feu préconisent d'utiliser un numéro unique pour tous les secours: le 112, une ligne valide dans l'ensemble de l'Union européenne, qui existe depuis 2000 en France. À terme, l'idée serait que le 112 remplace tous les numéros d'urgence qui existent en France (le 15 pour le Samu, le 17 pour la police, le 18 pour les pompiers, etc.), comme c'est le cas aux États-Unis où l'on compose le 911 pour toutes les urgences.
Explications en cinq points.
• D'où vient cette idée ?
Une première expérimentation a été menée à l'hiver 2013-2014 à Paris. Plusieurs plateformes (17 et 18/112) ont été réunies sous l'égide de la Brigade de sapeurs-pompiers de Paris (BSPP). Face au succès de l'opération, le ministère de l'Intérieur a engagé début 2015 une réflexion sur la mutualisation des plateformes d'appels sur le territoire national. Favorable depuis longtemps à cette mesure, c'est la première fois que les pompiers, qui planchent sur cette question depuis plusieurs mois, proposent officiellement d'abandonner le 18 au profit d'un numéro unique.
• Pourquoi les pompiers militent pour un numéro unique ?
Premier argument avancé par les pompiers : la clarté.
À l'heure actuelle, il existe une dizaine de numéros d'urgence en France. Si la plupart des Français connaissent les trois principaux (le 15, le 17 et le 18), peu savent que le 191 est utilisé pour les urgences aéronautiques, le 197 pour une alerte attentat ou enlèvement ou que le 114 est destiné aux personnes sourdes et malentendantes.
Résultat, «personne ne les connaît et cela entraîne une certaine confusion, explique le colonel Éric Flores, conseiller du président à la Fédération nationale des sapeurs-pompiers de France (FNSPF). Un numéro unique permettrait donc de simplifier le service et de gagner en clarté».
Second argument : l'efficacité.
Les pompiers gèrent actuellement une centaine de centres de réception du 18 (un par département) auxquels il faut ajouter les quelque 350 centres gérés par la police, la gendarmerie et le Samu dans toute la France, ce qui peut parfois faire doublons.
Autre problème : dans la plupart des cas, les plateformes ne sont pas interconnectées. Autrement dit, si vous appelez les pompiers alors que le Samu est bien plus à même de répondre à votre situation d'urgence, les «standardistes du 18» seront obligés de vous demander de raccrocher et d'appeler le 15.
Une perte de temps. Avec un numéro unique, le traitement des appels serait plus fluide puisqu'une seule plateforme permettrait de rediriger les appels directement vers le bon interlocuteur.
Dernier argument : la rationalisation des coûts ??
En réunissant toutes les plateformes, les pompiers entendent bien faire des économies et éviter de nouvelles fermetures de casernes - près de 1000 casernes ont fermé en France depuis dix ans. «Nous n'avons plus les moyens de gérer tous ces centres», tranche Éric Faure, président de la FNSPF. Aucune estimation chiffrée n'a été toutefois fournie par les pompiers sur la baisse des dépenses qu'occasionnerait une telle mesure. «Plus que des économies, une réorganisation permettrait surtout de réaffecter les ressources ailleurs», plaide le colonel Éric Flores. «Plutôt que d'être au téléphone, les effectifs pourraient davantage intervenir sur le terrain». Dans un rapport de 2013, la Cour des comptes dénonçait déjà le coût «disproportionné» des petites permanences par rapport à leur niveau d'activité. Elle préconisait à ce titre un regroupement des plateformes, permettant des économies de personnel, d'équipements et de locaux. Pour l'heure, quelques fusions 15/18 ont été effectuées localement dans une vingtaine de départements.
• À quoi ressemblerait le nouveau système ?
À la place des 450 centres d'appels existant en France, la Fédération des pompiers propose de mettre en place une dizaine ou une vingtaine de grands centres communs. Dans un seul et même bâtiment, un premier service serait chargé de filtrer et de réorienter les appels vers le(s) autre(s) bon(s) service(s). «Les agents de ce premier call center identifieraient l'urgence et pourraient donner une réponse multiservices en ayant la capacité de mobiliser au même moment les pompiers, la police et le Samu, si besoin est», détaille le colonel Éric Flores.
• Quelle perspective pour cette mesure ?
Comment organiser les nouveaux centres d'appels? À quel niveau les mettre en place (régional, en fonction de la densité de la population, etc.)? Quels pourraient être leur modalités de fonctionnement? Toutes ces questions seront abordées au cours du congrès d'Agen qui sera clôturé samedi par Bernard Cazeneuve. Quand cette mesure pourrait-elle voir le jour? Le ministre de l'Intérieur devrait s'exprimer à ce sujet ce week-end. Selon nos informations, il envisagerait de lancer une expérimentation sur un département dans la région Centre pour tester un rapprochement des plateformes 17 et 18.
• Quid du 112 en France ?
Dans certains pays d'Europe, le 112 est devenu le principal numéro d'urgence national. C'est notamment le cas du Danemark, de l'Espagne, de la Finlande, des Pays-Bas, du Portugal, de la Suède et de la Roumanie, etc...
En comparaison, la France paraît beaucoup plus à la traîne. Elle continue de faire cohabiter ce numéro avec les autres numéros d'urgence nationaux. Les Français connaissent-ils bien ce numéro? On pourrait le penser. Sur les 24,2 millions d'appels reçus par les pompiers en 2013, 44% provenaient du 112. Mais en réalité, le numéro est surtout composé par les touristes étrangers et émane en grande partie des téléphones portables, qui redirigent automatiquement les 15, 17 ou 18 vers le 112. «Il y aura donc un vrai travail de communication à faire», commente le colonel Flores.
Source
http://www.lefigaro.fr/actualite-france/2015/09