En vertu de l’article R. 241-48 du Code du travail, le salarié nouvellement embauché doit bénéficier d’un certain nombre d’examens médicaux, parmi lesquels figure obligatoirement une visite médicale d’embauche.
Cette visite, qui doit avoir lieu, au plus tard, avant l’expiration de la période d’essai, a pour but :
1°) de vérifier si le salarié n’est pas atteint d’une affection dangereuse pour les autres employés;
2°) de s’assurer qu’il est médicalement apte au poste de travail auquel il est destiné;
3°) de proposer d’éventuelles adaptations du poste ou une affectation à un autre poste.
Lorsque vous embauchez un nouveau salarié, vous devez lui faire passer une visite médicale d’embauche. A défaut, vous devrez lui verser des dommages et intérêts...
Visite médicale avant ou après l'embauche
Cas général : avant la fin de la période d'essai.
- Avant l'embauche, ou au plus tard avant l'expiration de la période d'essai, tout salarié doit être soumis à une visite médicale (c. trav. art. R. 241-48).
Exception. - Un nouvel examen d'embauche n'est pas toujours obligatoire notamment si le salarié est appelé à occuper un emploi identique à celui qu'il a quitté. À l'inverse, pour certains salariés dit « fragiles », la visite a obligatoirement lieu avant l'embauche (ex. : handicapés, femmes enceintes).
Handicap révélé après l'embauche
Le salarié n'a pas à révéler son état de santé à l'employeur. - Le candidat à l'emploi ne doit confier les renseignements sur son état de santé qu'au médecin chargé de son examen médical d'embauche.
Cette règle peut avoir des conséquences graves lorsque l'employeur décide que le salarié recruté prendra ses fonctions avant la visite : si l'examen révèle que le salarié ne peut pas tenir son poste, l'employeur ne peut se prévaloir d'un prétendu mensonge du salarié (dol) quant à son état de santé ou son handicap dans la mesure où ce dernier n'a pas à le lui révéler.
En pratique, l'employeur peut avoir intérêt à organiser la visite d'embauche avant l'entrée en fonction.
Nullité du licenciement en raison de la santé du salarié.
- L'employeur informé postérieurement à l'embauche de l'impossibilité du salarié de tenir son poste tel qu'initialement proposé en raison de sa santé ne peut le licencier pour ce motif. Un tel licenciement serait nul car discriminatoire (cass. soc. 21 septembre 2005, n° 1846 FSPBI).
Employeurs : oublier la visite médicale d’embauche peut vous coûter cher !
Par Nadine Regnier Rouet, Avocat
-http://www.village-justice.com/articles/Employeurs-oublier-visite-medicale,9530.html
Par une décision du 5 octobre 2010 (n° 09-40913), la Cour de cassation indique avec sévérité :
“ L’employeur, tenu d’une obligation de sécurité de résultat, doit en assurer l’effectivité (et organiser la visite médicale d’embauche de ses salariés). Le manquement de l’employeur cause nécessairement au salarié un préjudice (réparé par l’allocation de dommages-intérêts) ”.
Vous voici donc prévenus : chacun de vos salariés n’ayant pas vu le médecin du travail à son embauche a donc potentiellement le droit de vous réclamer des dommages-intérêts qui lui seront systématiquement alloués par le Conseil de Prud’hommes en vertu de la décision qui vient d’être rendue et ce, sans avoir à prouver un préjudice spécifique. D’où le rappel qui suit…
Comment procéder à la visite médicale d’embauche ?
La Loi nous dit que la visite médicale d’embauche doit avoir lieu avant l’embauche ou au plus tard avant la fin de la période d’essai (Article R.4624-10 du Code du travail).
Le fait de conditionner l’embauche effective au résultat positif de la visite médicale, déclarant le salarié « apte », et de programmer la visite médicale avant le premier jour de travail permet à l’employeur de ne pas donner suite à son offre d’embauche si le résultat de cette visite médicale ne débouche pas sur cette déclaration d’aptitude au poste proposé.
De même, dans le cadre d’un contrat de travail comportant à la fois une période d’essai et la condition d’aptitude au poste, l’organisation de la visite médicale d’embauche au début de cette période d’essai permet dans les faits à l’employeur de ne pas poursuivre le contrat de travail si la condition d’aptitude n’est pas remplie.
Zoom sur les autres visites obligatoires qui peuvent aussi vous coûter cher !
- Examen périodique : tous les 24 mois (Article R. 4624-16 du Code du travail) ;
- Examen de reprise : il a lieu après un arrêt de travail de plus de 21 jours, un congé maternité, une absence pour maladie professionnelle, une absence d’au moins 8 jours pour accident du travail.
Attention danger pour les employeurs ! La Cour de cassation a récemment rendu deux autres arrêts concernant des omissions de visites médicales de reprise : arrêt du 5 octobre 2010 (n° 09-41642) et arrêt du 6 octobre 2010 (n° 09-66140).
Elle condamne l’employeur pour cette omission dan les termes suivants : « L’initiative de la visite de reprise appartient normalement à l’employeur dès lors que le salarié qui remplit les conditions pour en bénéficier se tient à sa disposition pour qu’il y soit procédé ».
La Cour affirme ainsi qu’il n’est pas nécessaire que le salarié ait sollicité la visite de reprise après une absence de 21 jours car il appartenait à l’employeur d’organiser celle-ci. Et sa carence justifie par elle-même la mise en cause et la condamnation du chef d’entreprise.
Le verdict ?
Des dommages-intérêts pour licenciement abusif, soit 6 mois bruts de salaires minimum à verser au salarié pour cette omission (lorsque le salarié compte un an d’ancienneté et appartient à une entreprise d’au moins onze salariés).
Comment en arrive-t-on à une peine aussi lourde ?
Parce que le salarié :
1) a considéré que son employeur avait commis une faute contractuelle en ne procédant pas à la visite médicale de reprise et
2) a « pris acte » de la rupture de son contrat de travail aux torts de l’employeur en portant l’affaire devant le juge prud’homal à qui il a demandé de requalifier cette prise d’acte en un licenciement abusif (le juge devant requalifier cette prise d’acte soit en un licenciement abusif, soit en une démission du salarié).
La Cour de cassation a donné raison au salarié :
- elle affirme que la gravité de l’omission par l’employeur de la visite médicale de reprise était telle qu’elle s’analyse en une inexécution de ses obligations au titre du contrat de travail.
- Par conséquent, cette inexécution contractuelle fondait la prise d’acte du salarié et lui donnait effectivement les effets d’un licenciement abusif :
« Le manquement de l’employeur à son obligation d’organiser la visite de reprise est suffisamment grave pour justifier une prise d’acte de rupture aux torts de l’employeur. »Le principe fondateur qui sous-tend la condamnation de l’employeur est, encore une fois, la fameuse obligation de sécurité de résultat qu’assume l’employeur vis-à-vis de chacun de ses salariés.
Obligation « de sécurité » créée par la jurisprudence de la Cour de cassation qui rend l’employeur garant de la conservation de la santé physique et mentale de ses salariés au travail ; obligation qui étend peu à peu son emprise au fil des décisions de la Cour, notamment, dans des hypothèses où une exigence formelle ou réglementaire a été omise par l’employeur -ici, passer une visite médicale- sans toutefois qu’un accident ou une maladie ne se soit déclaré.
Mon conseil RH
Sans aucun doute possible, organisez-vous (agenda, tableau de bord, etc.) pour respecter les dates des visites médicales obligatoires de vos salariés ! Conservez les preuves de ces visites (fiche d’aptitude) !
Dans la même rubrique du site mentionné :
-http://www.village-justice.com/articles/Droit-protection-sociale,77
L’horizon du 1er janvier 2012 se rapproche pour les entreprises et groupes de 50 salariés et plus, sur un thème sensible :
la prévention de la pénibilité.Rappelons que la loi de réforme des retraites du 9 novembre 2010 leur impose d’être couverts par un accord ou un plan d’action en faveur de la prévention de la pénibilité d’ici cette date, sous peine d’une lourde pénalité pouvant atteindre 1% de la masse salariale (autant d’argent que l’employeur ne pourra alors plus consacrer à des investissements ou à l’amélioration du statut social au sein de l’entreprise).
Ceci étant, tous les décrets d’application n’ont pas encore été pris.
A cette date, seul le décret n° 2011-354 du 30 mars 2011 est venu codifier, à l’article D4121-5 du Code du travail, la définition –limitative– des facteurs de risques professionnels. On sait que la pénibilité pourra être caractérisée par l’exposition :
- soit à des contraintes physiques marquées (manutentions manuelles de charges ; positions forcées des articulations ; vibrations mécaniques) ;
- soit à un environnement physique agressif (agents chimiques dangereux y compris les poussières et les fumées ; activités exercées en milieu hyperbare ; températures extrêmes ; bruit) ;
- soit à certains rythmes de travail (travail de nuit ; travail en équipes successives alternantes ; travail répétitif avec un temps de cycle défini).
On connaît également les orientations envisagées par le Ministère du travail, de l’emploi et de la santé concernant :
- le contenu obligatoire des accords et plans d’action ;
- les modalités procédurales d’application de la pénalité de 1% et les conditions dans lesquelles l’employeur pourra justifier de sa défaillance.
Sur le premier point, un projet de décret simple prévoit que seraient concernées par le dispositif les entreprises dont au moins 50% de l’effectif sont exposés aux facteurs de pénibilité ci-dessus. Le curseur de cette proportion minimale serait ainsi fixé à un niveau relativement élevé, ce qui devrait avoir pour effet d’exclure bon nombre d’entreprises de l’obligation d’être couvertes par un accord ou un plan d’action (ce qui ne signifierait pas pour autant absence d’obligation de prévention puisque la pénibilité constitue aujourd’hui un nouveau risque professionnel). Encore faudra-t-il bien cartographier en amont les postes et effectifs concernés, sachant que cette liste serait établie sous la responsabilité de l’employeur et réactualisée à l’occasion notamment de chaque modification du document unique d’évaluation des risques … attention donc aux effets de seuil !
S’agissant des thèmes obligatoires, signalons l’obligation de traiter de la réduction de la poly-exposition aux facteurs de risques et/ou de l’adaptation-aménagement des postes de travail concernés ; ainsi que de 2 thèmes parmi la liste suivante : amélioration des conditions de travail, développement des compétences, qualifications et accès à la formation, aménagement des fins de carrière, maintien dans l’emploi et prévention de la désinsertion professionnelle.
Seraient également rendus obligatoires :
- un diagnostic préalable des situations de pénibilité ;
- des mesures préventives ;
- des mesures de suivi et de communication au CHSCT (ou aux DP à défaut) ;
- des objectifs chiffrés ;
- des indicateurs de suivi.
On retrouve là le format des plans seniors. A ce sujet, le second projet de décret (en Conseil d’Etat) également à paraître, envisage que les entreprises déjà couvertes par un accord ou un plan d’action seniors prévoyant des mesures de prévention de la pénibilité comme cela est possible, puisse être réputées respecter leurs obligations en matière de pénibilité et bénéficier d’une « dispense », jusqu’au terme de leur dispositif seniors (à condition bien entendu que ce dispositif soit régulièrement mis en place et effectivement suivi).
Affaire à suivre donc, d’ici la publication de ces textes d’application.