Auteur Sujet: Delai d'application d'une loi ?  (Lu 9570 fois)

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Hors ligne christophe62

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Delai d'application d'une loi ?
« le: 21 janvier 2009, 16:10:34 »
Bonjour
j'ai une question qui n'a rien a voir avec tout ça mais comme elle ne devrait pas faire débat je la poste ici
- une loi est applicable quand ??
quand elle est votée ?
ou alors à la date de parution dans le JO ?


Hors ligne J.A.

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Re : Delai d'application d'une loi ?
« Réponse #1 le: 21 janvier 2009, 16:35:47 »
Bonjour,
L'article 1er du Code civil (depuis sa modification par l'ordonnance n° 2004-164 du 20 février 2004) dispose que :

« Les lois et, lorsqu'ils sont publiés au Journal officiel de la République française, les actes administratifs entrent en vigueur à la date qu'ils fixent ou, à défaut, le lendemain de leur publication. Toutefois, l'entrée en vigueur de celles de leurs dispositions dont l'exécution nécessite des mesures d'application est reportée à la date d'entrée en vigueur de ces mesures.

« En cas d'urgence, entrent en vigueur dès leur publication les lois dont le décret de promulgation le prescrit et les actes administratifs pour lesquels le Gouvernement l'ordonne par une disposition spéciale.

« Les dispositions du présent article ne sont pas applicables aux actes individuels.

La loi : son entrée en vigueur, sa disparition  ^-^
http://www.legifrance.gouv.fr/Droit-francais/Guide-de-legistique/III.-Redaction-des-textes/3.8.-Entree-en-vigueur/3.8.1.-Techniques-d-entree-en-vigueur

Avant d'être appliquée, la loi doit être préparée et votée.
A lire " Le Sénat et la loi " ICI
Quand la loi émane du gouvernement, on parle de projet de loi et quand la loi provient d'un parlementaire on parle de proposition de loi.
Ce projet ou cette proposition est étudié successivement par les deux chambres du Parlement (Assemblée Nationale et Sénat). On appelle cela la 'navette': l'objectif est que les deux chambres se mettent d'accord sur la rédaction définitive de la future loi (les parlementaires ont un droit d'amendement pendant la navette). Quand cet objectif est atteint, le texte peut être voté par les deux chambres.

Le texte est alors voté par l'Assemblée Nationale en des termes identiques au dernier mot du Sénat. Parfois le gouvernement, quand il y a désaccord entre les deux chambres, peut faire adopter le texte malgré le désaccord du Sénat après la réunion d'une commission mixte paritaire (cf article 45 de la constitution). Cette commission est composée de 7 députés (Assemblée Nationale) et de 7 sénateurs (Sénat) pour but d'élaborer un texte susceptible d'être adopté par les deux chambres.

Mais, pour entrer en vigueur, il faut respecter certaines conditions.

I - Conditions

A) promulgation

L'article 1 du code civil énonce que "les lois sont exécutoires dans tous le territoire français, en vertu de la promulgation qui en est faite par le président de la République". Cette procédure concerne seulement les lois au sens formel (celles votées par le Parlement) et non les règlements qui sont exécutoires par nature.

1) la procédure de promulgation

Promulguer une loi est une des prérogatives du président de la République (cf article 10 de la constitution). Elle s'effectue par décret qui doit être fait dans les 15 jours qui suivent la transmission au gouvernement de la loi définitivement adoptée.

Mais selon ce même article 10, le président de la République peut, avant l'expiration du délai de 15 jours, demander au Parlement une nouvelle délibération de la loi ou de certains de ses articles (c'est un pouvoir important mais limité dans le temps: après le vote définitif mais avant la promulgation).

Le délai de promulgation est suspendu quand le conseil constitutionnel est saisi d'un recours en contrôle de constitutionnalité de la loi votée par le Parlement.

2) les effets de cette promulgation
# La promulgation: atteste de l'existence de la loi, de la régularité de la procédure législative
# confère au texte voté le caractère authentique, elle authentifie la loi
# donne l'ordre aux autorités publiques d'observer la loi et de la faire observer, le texte est rendu exécutoire

B) publication

La publication est l'acte matériel d'exécution de la promulgation, consistant à imprimer dans un document officiel le texte promulgué. Cette publication est opérée par une insertion au Journal Officiel (JO). Cette procédure est exigée pour les lois mais aussi pour les décrets (même s'il n'y a pas promulgation) et les traités ratifiés.

L'effet de la publication est nette: la publication est indispensable à l'exécution d'une loi. L'article 1 du code civil prévoit que les lois "seront exécutées dans chaque partie de la République, du moment où la promulgation en pourra être connue". Ainsi, la publication rend la loi obligatoire et, à défaut, tant que le texte n'est pas publié, il n'est pas obligatoire (les citoyens ne sont pas censés en avoir eu connaissance).

Une difficulté se pose quand le texte publié (ou une partie) est entaché d'inexactitudes, c'est-à-dire qu'il diffère du texte promulgué. Dans ce cas, le gouvernement peut faire paraître un rectificatif appelé 'erratum' pour réparer le(s) erreur(s)/omission(s).

La pratique des 'errata' rend certains perplexes quant à leur nature juridique car il y a deux situations:
# le rectificatif est légitime quand il a pour objet de réparer une erreur matérielle suffisamment apparente à la seule lecture du texte (erreur de frappe). Dans ce cas, les tribunaux considèrent que le rectificatif s'incorpore à la loi corrigée et revêt la même force qu'elle.
# il n'est pas par contre possible de prendre par la voie du rectificatif une disposition qui aurait pour résultat de modifier la portée du texte voté. Les tribunaux ont ainsi déclaré sans valeur un rectificatif apparaissant comme une disposition nouvelle ayant pour but de restreindre considérablement la portée du texte primitif publié au Journal Officiel. Un erratum modifiant la portée de la loi ou d'un décret n'a pas de valeur juridique.

II - Date d'entrée en vigueur

A) principe

La loi n'est pas obligatoire le jour même de sa publication.
La date de la publication fait courir 'un délai d'attente' à l'expiration duquel la loi devient obligatoire.

Ce délai diffère entre Paris et la province :

    - à Paris: la loi est applicable 1 jour franc après sa publication au Journal Officiel ex. loi publiée le 31 mai/applicable le 2 juin à minuit à Paris.
    - en Province: la loi est applicable 1 jour franc après l'arrivée du Journal Officiel au chef-lieu d'arrondissement (préfecture) ex. loi publiée le 31 mai/arrivée à la préfecture de Quimper le 1 juin à 18h/applicable le 3 juin à minuit.

B) exception

Dans certains cas, le législateur retarde ou accélère l'application d'une loi.
    Il retarde la date d'entrée en vigueur quand la loi:
    - suppose la mise en place de structures nouvelles ou une adaptation importante qui nécessite un certain temps.
    - est subordonnée à la publication d'un décret d'application. Cette solution est indiscutable quand le législateur a indiqué expressément (dans le texte de loi) cette subordination et elle est admise quand la loi ne comporte pas d'indications suffisantes pour être mise en oeuvre sans éléments supplémentaires.

    [Dans ces 2 cas, la loi n'entrera en vigueur qu'au jour de la publication du décret d'application.]

    Plus rarement, il accélère l'entrée en vigueur d'une loi en cas d'urgence.

III - Les effets de l'entrée en vigueur de la loi: la force obligatoire

A) "Nul n'est censé ignorer la loi"

Cette règle ne signifie pas que tout le monde connait la loi (utopique) mais que personne ne peut invoquer son ignorance pour en écarter l'application pour échapper aux conséquences qu'elle emporte. Ce serait l'anarchie si l'application des lois pouvait dépendre des circonstances propres à ceux qui lui sont assujettis. Cette règle se justifie ainsi par la nécessité pratique de la vie en société.

Cette règle est une présomption irréfragable (par opposition à une présomption simple) de connaissance de la règle de droit qui pèse sur tous les sujet de droit: cela ne sert à rien d'essayer de prouver qu'on a aucune connaissance de la règle car on est présumé la connaitre.

C'est une règle lourde de conséquences, mais qui est tout de même à tempérer car tout le monde ne connait pas la loi. Il faut voir au cas par cas.

B) la distinction des lois impératives et les lois supplétives

1) le classement des règles en deux catégories

- les lois impératives ou lois d'ordre publique: ce sont celles qui s'imposent avec une force absolue. Elles ne peuvent en aucune façon être écartées par les sujets de droit (cf article 6 du code civil) ex. règle des congés payés en droit du travail.

- les lois supplétives de volonté ou interprétatives: elles ne s'appliquent qu'à défaut de manifestation de volonté contraire de la part des sujets de droit. La loi ne s'impose qu'à ceux qui n'ont rien prévu pour régler tel point de leur vie juridique. On dit dans ce cas que la loi propose à titre supplétif une solution dans le silence des partis. Par conséquences, ces lois peuvent être éludées par la volonté contraire des personnes qui y sont soumises ex. en cas de vente, l'acheteur doit payer le prix au moment et au lieu où la chose est livrée... mais on peut déroger à cette règle. Attention: la force obligatoire existe toujours dans ce type de loi, elle est juste atténuée car elle s'applique tant que les parties ne l'ont pas écartée.

2) le critère de la distinction

La distinction se justifie par la notion d'ordre public. Celle-ci englobe tous les principes et toutes les règles d'ordre social et moral que le législateur juge essentiel pour le bon ordre de la société et qui, de ce fait, s'impose au respect de tous les individus.

Traditionnellement, l'ordre public était définit par référence à l'intérêt général. Il veille à la sauvegarde des intérêts de la collectivité (toutes les lois en rapport avec la famille...). Les lois relatives à des principes essentiels pour la société sont des lois d'ordre public. Celles concernant des intérêts strictement individuels peuvent être écartées par les particuliers (ce sont les lois supplétives).

Aujourd'hui, la distinction n'est pas aussi simple.

Au XXème siècle, le développement du rôle de l’État dans la vie économique a conduit à ajouter, à cette ensemble de règle, des normes qui constituent ce qu'on appelle 'l'ordre public économique' et plus précisément 'l'ordre public social' ou 'l'ordre public de protection'. L'ordre public de protection = ordre public qui intervient au bénéfice d'intérêts individuels bien déterminés. La loi ne dit pas toujours si elle est d'ordre public ou si elle est supplétive. C'est le juge qui, à défaut de précision du législateur, devra trancher.

IV - La disparition de la loi

La force obligatoire de la loi est normalement permanente, mais il faut mettre à part le cas des lois temporaires: celles qui ne sont destinées à s'appliquer que pendant une période donnée et sont donc anéanties à l'arrivée de l'échéance fixée ex. les lois de finance sont annuelles.

En principe, une loi ne cesse de s'appliquer que par son abrogation qui a pour effet d'anéantir pour l'avenir une loi ou un réglement. En effet, une loi abrogée n'est pas rétroactivement anéantie: quand il y a abrogation d'une loi, celle-ci disparaît pour le futur et non pour le passé (contrairement à l'annulation).

A) abrogation expresse

Quand la loi nouvelle contient une disposition spéciale d'abrogation de la loi ancienne...

abrogation par ricochet: dans cette hypothèse, le législateur abroge une disposition à laquelle une autre loi se réfère. En principe, cette dernière est considérée comme abrogée.

abrogation formulée abstraitement: quand le nouveau texte énonce que "sont abrogées toutes les dispositions contraires à la présente loi", il y a une incertitude quand à la portée de l'abrogation. C'est la cour de cassation qui va interpréter et contrôler la portée exacte de cette abstraction.

B) abrogation tacite

Il y a abrogation tacite en dehors de toute formule d'abrogation. Lorsque les dispositions de la loi ancienne sont inconciliables/contradictoires avec celles de la loi ancienne et incompatibles avec leur maintient.

En effet, dans pareil cas, il n'y a pas d'application simultanée possible des 2 lois: la loi ancienne est donc considérée comme abrogée car elle ne peut être maintenue.

Mais, ce principe est à nuancer en fonction de la portée des textes contradictoires. A cet effet, il faut distinguer les lois générales (qui sont le droit commun, les règles générales) et les lois spéciales (les exceptions, les solutions spéciales données à un particulier). Quand il y a contradictions entre ces 2 lois, l'adoption d'une loi générale nouvelle n'entraîne pas en principe l'abrogation d'une loi spéciale plus ancienne. Cette loi spéciale subsiste comme une exception à une règle nouvelle (si le législateur n'a pas prévu autre chose). C'est l'application du principe "les lois générales ne dérogent pas aux lois spéciales".

NB: abrogation par désuétude

Le simple fait qu'une loi soit restée sans application pendant très longtemps suffit-il à considérer qu'elle n'existe plus, qu'elle soit abrogée par désuétude?

En principe, si l'on constate seulement l'absence de mise en œuvre d'un texte de loi, aucune abrogation ne serait admise (caractère permanent de la loi).

Mais selon certains auteurs, si dans la vie juridique il se manifeste des pratiques contraires à la loi, la solution pourrait être différente.

D'autres infos sur
http://www.vie-publique.fr/decouverte-institutions/institutions/fonctionnement/parlement/loi/quand-loi-entre-t-elle-vigueur.html

ET
http://netcampus.free.fr/droit/civil/1-loientreedisparition.php3 le site de l’Étudiant en Droit.