40 ans déjà. En ce temps là, les Français découvrent les vacances économiques dans un pays émergeant : l'Espagne.
Mais que le chemin est long sans aucune vraie infrastructure routière et l'accident est vite arrivé.
C'est ainsi que je me retrouve à la porte d'une petite clinique tenue par une congrégation religieuse.
Travaillant aux "ambulances CARA" plutôt le service de transports aux poliomyélitiques du Professeur CARA " à l'hôpital Tarnier, AP de Paris, bientôt SAMU 75, je suis missionné par la jeune société Europ assistance pour rapatrier un jeune polytraumatisé.
Arrivé sur place, c'est tout juste si la bonne sœur de service me dit "mon fils, inutile d'entrer dans la chambre, Dieu s'occupe de tout…".
Forçant le blocus, je découvre effectivement un blessé mal en point, gaspant, bien cyanosé avec un énorme traumatisme thoracique et un impressionnant enfoncement inspiratoire. Le volet thoracique est historique. De plus aucun son n'est audible du côté gauche. La tension artérielle est faible.
Zoro se met en route :
perfusion d'une macromolécule : le Plasmion,
légère anesthésie avec du gamma-OH + Valium et Dolosal,
intubation nasale (la voie d'abord de l'époque) à l'aveugle, au souffle
ventilation avec l'ancêtre des respirateurs à cellules dites logique : le Celog (petit boitier assez miraculeux pour l'époque)
drainage thoracique à la volée avec un trocart de Joly et utilisation d'une double valve antiretour (société Vygon)qui permettait d'appuyer dessus pour faire sortir air et sang recueillis dans une poche à urine.
Peu à peu la situation désespérée s'améliore et si le volet n'est pas complètement stabilisé, l'oxygénation est suffisante.
Le blessé est quasi kidnappé et mis dans une ambulance, perfusion de macromolécules plein pot suspendue à un…balai scotché à l'extérieur du véhicule !
Mon avion personnel Mystère 20 me ramène à Paris où comme dans les belles histoires, le jeune homme sera sauvé.
C'était une époque, où nous anesthésistes-réanimateurs plein d'enthousiasme, des chantiers nous attendaient : 20 ans de progrès en réanimation, création de SAMU, SMUR, constructions d'hôpitaux, service de réanimation dans chaque hôpital, sociétés d'assistance, puis salle de réveil, service d'urgence, médicalisation des urgences avec senior, enseignement de l'urgence, de la médecine de catastrophes…
L'Espagne de son côté construisait de belles autoroutes, de magnifiques hôpitaux, et bétonnait ses côtes ensoleillées tout cela grâce à l'Europe jusqu'à… la crise.
