Les contentions et les barrières de lit 23/04/2017
Législation : Les contentions et les barrières de lit
(Mise à jour - Circulaire du 29 Mars 2017 - DGOS/R4/DGS/SP4/2017/109 + Loi santé 2016)
Liminairement, regardons de plus près ce que dit la Loi, il est clair et net que, sauf cas prévu par la Loi, nul ne peut être entravé et/ou privé de liberté, c'est une infraction appelée séquestration.
Article 224-1 du code pénal :
"Le fait, sans ordre des autorités constituées et hors les cas prévus par la loi, d'arrêter, d'enlever, de détenir ou de séquestrer une personne, est puni de vingt ans de réclusion criminelle.
Les deux premiers alinéas de l'article 132-23 relatif à la période de sûreté sont applicables à cette infraction.
Toutefois, si la personne détenue ou séquestrée est libérée volontairement avant le septième jour accompli depuis celui de son appréhension, la peine est de cinq ans d'emprisonnement et de 75000 euros d'amende, sauf dans les cas prévus par l'article 224-2."
Donc en ce qui va concerner les droit prévus pour nous, ambulanciers, ils se limitent comme indiqué à ceux "prévus par la Loi".
Cas des patients pris en charge en psychiatrie
La contention à visée psychiatrique est un "bénéfice" pour le patient, elle est prescrite par le médecin dans un objectif thérapeutique de protection pour le patient lui-même et pour autrui.
L’article L3222-5-1 du code de la santé publique rappelle d’ailleurs que la contention est un ultime moyen de « dernier recours » dont seul un médecin psychiatre prescrit l’usage.
L'ambulancier est un exécutant d'une prescription médicale, il ne lui appartient pas de juger si une contention est adaptée ou non dans un cadre d'absence de danger.
Il sera donc strictement interdit à l’ambulancier de poser des contentions à un patient en l’absence de prescription médicale d’un médecin psychiatre et en l’absence de danger immédiat avéré (sur lequel nous allons revenir plus loin).
Quiconque, hors cadre de danger légitime, pose des contentions physiques à un patient, commet donc les infractions de séquestration et d’exercice illégal de la médecine.
Cas des patients hors contexte strictement psychiatrique (EHPAD etc...)
Nous avons tous été confrontés à ce cas de conscience, du retour du patient en EHPAD, avec l’impossibilité de savoir si prescription médicale de barrière il y a, ou non.
La circulaire du 29 mars 2017 pose une description précise de la « contention mécanique » du patient au lit :
« la contention mécanique consiste à restreindre ou maîtriser les mouvements d’un patient par un dispositif fixé sur un lit dans un espace dédié » (cela inclus donc également les barrières de lit qui restreignent les mouvements du patient)
En 2000, l’ANAES puis par la suite la Haute Autorité de Santé (HAS) on repris le même rapport et élargi les définition (chapitre I) aux contentions dites « passives ».
Ainsi constituent des contentions :
- Les gilets et sangles thoraciques ainsi que les ceintures ;
- Les attaches de poignets et de chevilles ;
- Les sièges gériatriques, les sièges avec adaptable fixé ;
- Les barrières de lit ;
- Tout matériel détourné de son usage initial visant à restreindre ou limiter les mouvements du patient (draps, vêtements, chaussettes, serviettes....)
Elle rappelle que la décision de placer ces contentions est « une décision médicale » dont l’auteur doit être identifié, la prescription motivée et datée, le matériel et la méthode prescrite (page 16) et de conclure que les contentions ne doivent en aucun cas être des mesures visant à « expédier » la problématique ou à prévenir les chutes.
REMARQUE IMPORTANTE : Les barrières des brancards de nos ambulances ne sont pas concernées, car ne pouvant empêcher le patient de se mouvoir ou de se dégager du brancard, elles ne constituent pas un moyen de contention.
L’ambulancier s’abstiendra de manière absolue, de placer, enclencher ou encore activer les moyens de contentions listés ci-dessus en l’absence d’une prescription médicale.
Si il lui est impossible de s’assurer de l’existence de cette prescription, il privilégiera alors la mise en position la plus basse possible du lit (au ras du sol) afin de prévenir les chutes, mais en aucun cas de procéder au relevage des barrières.
À plus forte raison qu’une personne réellement désorientée ou présentant un risque avérée de chute, tentera de passer par dessus, et risquera de chuter d’encore plus haut.
D’autre part l’article L1142-1 du code de la santé publique stipule clairement qu’un professionnel de santé n’est responsable qu’en cas de faute avérée.
Jamais l’ambulancier ne pourra être inquiété en cas de chute due à une absence de contention si il ne les a pas placé en l’absence de prescription.
En revanche, il sera clairement impliqué de sa responsabilité s'il les places en l’absence de prescription au nom de « la prévention » ou toutes autres considérations qui ne relèvent pas d’une décision médicale.
En vous rappelant encore, qu'une fois le patient déposé et la relève faite, il n'est plus sous la responsabilité de l'ambulancier mais de l'établissement, et qu'il incombe alors à l'équipe soignante de gérer sa sécurité (Circulaire DHOS/SDO/O 1 n° 2003-277 du 10 juin 2003). N'oubliez pas d'informer le personnel soignant de la fin de votre prise en charge.
Cas des dangers imminents et avérés (légitime défense de soi-même ou d’autrui)
L’article 122-7 du code pénal rappelle :
« N'est pas pénalement responsable la personne qui, face à un danger actuel ou imminent qui menace elle-même, autrui ou un bien, accomplit un acte nécessaire à la sauvegarde de la personne ou du bien, sauf s'il y a disproportion entre les moyens employés et la gravité de la menace »
C’est ici le seul cas pour lequel l’ambulancier peut « neutraliser » par la contention, un patient, sans aucune prescription.
Attention toutefois à ce que la mesure de contention soit particulièrement adaptée, proportionnée, et qu’elle ne représente pas un danger pour le patient (on bannira par exemple l’enfermement dans le matelas coquille qui prive l’ambulancier de tout accès au patient ou encore la contention alors que le patient est en position ventrale, qui risquerait d’entraver les mouvements respiratoires, à plus forte raison qu’il sera agité, entre autres...) et bien entendu de rendre compte à l’autorité médicale IMMEDIATEMENT de la mesure (appel 15, appel au médecin prescripteur...)
Dans tous les cas cette mesure d’urgence sera strictement limitée dans le temps et tous moyens permettant de s’en passer devra être envisagé.
Il est également rappelé que la restriction de liberté à des effets majeurs sur le patient (tachycardie, agitation, crise clastique, poussée d'adrénaline dangereuse, sujétion, décompensation psychiatrique etc....)
Dans le cas de la nécessité d'urgence citée ci-dessus, il est donc totalement hors de question de rouler avec le patient contenu sans avoir eu un avis médical.
Restons donc professionnels et assurons-nous de prendre toutes les mesures déontologiques et légales pour que le respect fondamental qui doit être apporté aux patients soit de mise.
En cas de question, n’hésitez pas.
Le Bureau des Affaires Juridiques de
https://www.catsuf.fr/catsuf/legislation/379-les-contentions-et-les-barrieres-de-lit