Bonjour
La légitime défense efface l’infraction commise en ripostant, ainsi que le droit pour celui qui l’a rendu nécessaire par son agression, d’engager une action en dommages et intérêts s’il a subit un préjudice.
Pour le pratiquant d’arts martiaux, il s’agit de bien doser sa défense, en fonction de la gravité du danger, et surtout de ne pas attaquer le premier (après une agression verbale par exemple). En effet, pour lui, le juge sera encore plus strict, notamment sur le critère de la proportionnalité, puisqu’il sait mieux se défendre que quiconque. Un règlement verbal, grâce à une bonne maîtrise de soi, vaut donc mieux dans certains cas qu’un affrontement physique. Et puis, éviter le combat, n’est-ce pas là une victoire ?
La légitime défense est une notion que l'on retrouve dans la quasi-totalité des systèmes juridiques. « Il ne s'agit pas d'une excuse, mais d'un fait justificatif. C'est en quelque sorte un acte de police privée. On considère que la société n'a pas été à même d'assurer votre sécurité immédiate et que, dès lors, vous avez le droit de l'assurer vous-même », décrypte Yves Mayaud, professeur à l'université Paris-II-Panthéon-Assas, auteur du manuel « Droit pénal général »
Cependant, « Ce n'est pas de la justice privée. On ne parle pas de justifier la vengeance ou le règlement de comptes. C'est pourquoi la légitime défense s'apprécie de manière très stricte. »
Elle repose sur deux principes :
- l'immédiateté et la proportionnalité de la réplique. L'article 122-5 du Code pénal est, à cet égard, très clair : « N'est pas pénalement responsable la personne qui, devant une atteinte injustifiée envers elle-même ou autrui, accomplit, dans le même temps, un acte commandé par la nécessité de la légitime défense d'elle-même ou d'autrui, sauf s'il y a disproportion entre les moyens de défense employés et la gravité de l'atteinte. »
- la réponse doit être simultanée à la menace (il n'est pas question de partir à la recherche de son agresseur pour se faire justice soi-même) et mesurée à la gravité de l'acte (pas question de répondre à un croche-pied par un coup de couteau).
« J'ai obtenu la légitime défense pour un client qui avait répliqué à un coup de tête par un coup de poing », explique par exemple Me Nicolas Pasina, avocat au barreau d'Epinal (Vosges). Depuis 1994, le Code pénal est même encore plus précis : en cas de seule atteinte aux biens (par opposition à l'atteinte aux personnes), réagir en commettant un homicide volontaire n'est pas de la légitime défense.
Par ailleurs, l'article du Code pénal prévoit que la légitime défense vaut également pour autrui. C'est-à-dire qu'on justifie la réaction d'une tierce personne qui assiste à une agression.
Il existe enfin deux cas précis dans lesquels la légitime défense est présumée :
« Pour repousser, de nuit, l'entrée par effraction, violence ou ruse dans un lieu habité »
et,
« pour se défendre contre les auteurs de vols ou de pillages exécutés avec violence ».
Comme le résume Yves Mayaud, « la légitime défense ne pose pas de problème en droit, mais en fait. Car tout est une question de dosage et d'évaluation ».
« Concrètement, c'est extrêmement compliqué de la faire admettre par les magistrats.
Ils ont une vraie peur du mauvais exemple », confirme Me Caty Richard, une pénaliste du barreau de Pontoise (Val-d'Oise), qui suit actuellement deux dossiers sensibles.
A noter toutefois que la légitime défense peut être débattue à tous les stades de la procédure. « Je me souviens par exemple d'un dossier de rixe mortelle, confie le pénaliste parisien Me Thomas Bidnic. Mon client avait été renvoyé aux assises à l'issue de l'instruction, mais j'avais obtenu son acquittement en plaidant la légitime défense devant la cour. »